lundi 23 février 2015

Le poing victorieux vs coléreux (suite)


La joie et la colère sont des émotions primaires dites « activantes » puisqu’elles déclenchent une activation physiologique, un mouvement d’extériorisation propice à l’action et donc à leur expression. La principale distinction entre ces deux émotions fondamentales repose essentiellement sur le ressenti qui les accompagne. Alors que la joie est classée « positive », la colère, pour sa part, induit un ressenti négatif qui mène « hors de soi », voire à sortir de ses gonds.

La colère - le poing coléreux

Similairement à la joie, la colère est une émotion activante qui pousse à agir. À l’instar de Hulk (1), son émergence s’accompagne d’une montée fulgurante d’énergie, une pression intérieure grandissante qui procure une sensation de force et de puissance.

En raison du mouvement d’extériorisation qui l'accompagne, la colère est ressentie comme une émotion qui met « hors de soi », fait sortir de ses gonds, poussant ultimement à prendre une posture de riposte. Le gonflement de la posture, par exemple, sert à créer une impression d’immensité suggérant à l’adversaire sa capacité à se défendre (voir Être dans sa bulle - Espace et agressivité).

Alors que la joie jaillit d’un gain énergétique, c’est-à-dire d’un ajout, d’un mouvement porté pour soi, la colère, elle, surgit en réponse à une offense ou un tort, un mouvement porté contre soi. Étant essentiellement « un effort énergétique vers la reprise de son pouvoir » (2) et de son espace, la colère munit l’individu de toute l’énergie et de la force nécessaires pour passer à l’action.

Les manifestations physiques qui accompagnent l’émergence de la colère, comme le poing sur la table ou le frappement du pied au sol, entre autres, s’expliquent en grande partie par la contraction musculaire et la hausse énergétique inhérente à l’activation physiologique.

Il faut toutefois distinguer la colère de la violence, la première étant une émotion, une réponse biologique automatique, l’autre, un comportement.

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(1) Hulk est un personnage de bandes dessinées américaines. Sous les effets d’un stress ou d’une bouffée de colère intense, le docteur Bruce Banner se métamorphose en une imposante créature bestiale animée d’une force incommensurable. Alors que la colère fait « voir rouge », sa peau verte, elle, s’explique par une colère ancienne, contenue et « macérée » durant de nombreuses années, la sienne étant possiblement liée à la mort de son père alors qu’il était enfant.

(2) Caldwell, C. (2002). The Moving Cycle: A Model for Healing. In Integrative holistic health, healing, and transformation. ed. Penny Lewis, Illinois: C.C. Thomas; pp.273-294.

lundi 16 février 2015

Le poing victorieux vs coléreux


La joie et la colère sont des émotions primaires dites « activantes » puisqu’elles déclenchent une activation physiologique, un mouvement d’extériorisation propice à l’action et donc à leur expression. La principale distinction entre ces deux émotions fondamentales repose essentiellement sur le ressenti qui les accompagne. Alors que la joie est classée « positive », la colère, pour sa part, induit un ressenti négatif qui mène « hors de soi », voire à sortir de ses gonds.

La joie - le poing victorieux

La joie est une émotion activante au ressenti positif. Physiologiquement, elle génère une subite montée d’énergie qui pousse à agir, à bouger, à s’animer, bref à exprimer son effervescence.

Pour cette raison, la joie se manifeste généralement par des gestes et des mouvements du corps, une expression psycho-corporelle hautement visible, et parfois même audible, comme des sauts accompagnés de cris retentissants ou de rires en brandissant les bras, poings fermés, au-dessus de la tête.

Dans ce contexte, le poing, cette main fermée portée bien haut, désigne le geste du vainqueur. Glorieux et triomphant, il sert à signaler un avantage aux autres et sur les autres, une attitude de domination intrinsèque au statut de gagnant, à celui ou celle qui remporte un point, un succès, une bataille ou la victoire carrément.

Contrairement à la tristesse ou à la colère, la joie est rarement inhibée ou contenue. Certes, l’intensité de son expression diffère grandement d’une culture à l’autre, mais étant foncièrement activante, la joie est une émotion qui s’exprime spontanément, sur le champ et sans retenue. D’une part, qui voudrait s’en priver. D’autre part, et plus important encore, parce qu’elle est positive.

Contrairement aux émotions primaires au ressenti négatif qui peuvent agresser, gêner ou importuner les autres, la joie, en raison de son caractère hautement positif et dynamique, est agréable, invitante et même contagieuse comme le rire et le sourire.

lundi 9 février 2015

La phrénologie ou la «bosse des maths»


Vous a-t-on déjà dit que vous aviez la « bosse des maths »?

Cette expression du langage trouve son origine dans une théorie populaire qui régnait en Europe et en Amérique au début du 19ième siècle selon laquelle les protubérances du crâne humain révélaient le caractère et les traits dominants d’une personne.

Reconnue comme une science à l’époque, la phrénologie, ou « organologie » à l’origine, a été fondée par le neurologue allemand Franz Joseph Gall à la fin du 18ième siècle. C’est son collègue Johann Caspar Spurzheim qui introduisit la théorie en Amérique.

Selon la thèse phrénologique, chaque faculté humaine se trouve dans une zone spécifique du cerveau. En examinant les bosses sur la tête, les « palpeurs de crâne » (1), comme on appelait ceux et celles qui exerçaient cette pratique à l’époque, pouvaient déceler des tendances fortes ou propensions chez les individus, d’où la « bosse des maths » ou encore des qualités dominantes comme la bonté et la générosité: « Si l'on s'en remet aux phrénologistes, j'aurais fait un bon pasteur (...) j'avais une bosse de la vénération assez développée pour dix prêtres », témoigne Darwin (1809-1882) dans son autobiographie (2).

Qualifiée de « pseudo-science » en 1843, le modèle théorique, malgré de faux postulats, a tout de même ouvert la voie aux spécialisations fonctionnelles des régions cérébrales, une connaissance bien établie aujourd’hui.

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(1) Vous pouvez voir une « palpeuse de crâne » à l’œuvre dans le film La petite histoire du plaisir, version française de « Hysteria » (2012) réalisé par Tanya Wexler.

(2) Darwin, C. (2008). L'autobiographie. Paris: Seuil, p.56. Écrite au cours de l'année 1876, son autobiographie est publiée cinq ans après sa mort.

lundi 2 février 2015

Apathie et états dissociatifs


Les émotions perturbent. De fait, selon Hans Selye, père-fondateur du concept de stress et de ses effets nocifs sur la santé, les émotions constituent la principale source de stress chez l’être humain. Ce n’est pas peu dire.

Pour contrer ces « troublants » mouvements internes du corps, certains usent de mécanismes de défense comme le déni, le refoulement ou la contention par exemples, alors que d’autres se munissent plutôt d’une armure apathique.

Sorte d’« engourdissement » général du corps, de déconnexion kinesthésique, l’apathie sert foncièrement à prévenir l’émergence des émotions et ultimement leur ressenti. Apparaissant froids, flegmatiques ou même insensibles, plusieurs d’entre eux comprennent les émotions. Certains arrivent même à faire preuve d’« empathie » envers les autres, étant capables de raisonnement, de conscience morale, bref, de distinguer le bien du mal. Toutefois, et c’est là toute la différence, ils n’éprouvent pas les émotions en tant que telles, ayant éradiqué toute sensation émotionnelle. Dans ce cas-ci, le débranchement somatique étant complet, pas une seule once d’émotion ne fait frémir leur corps.

Cet état d’abnégation, voire de négation, émotionnelle qu’est l’apathie se différencie toutefois de la dissociation. Tel que mentionné antérieurement (voir Choc et état second), la dissociation est un puissant mécanisme de défense et de protection durant lequel l’esprit est ailleurs, « détaché » du corps physique, et plus souvent qu’autrement, loin d’une douleur physique ou morale intense.

Résultant d’un traumatisme grave, la dissociation se produit sous le coup du choc, et aux suites de celui-ci comme c’est le cas avec le trouble de stress post-traumatique. À long terme cependant, ce clivage entre le corps et l’esprit peut avoir des répercussions importantes sur la conscience et la santé globale, c’est-à-dire mentale et physique.

Outre la dissociation, durant laquelle la distance entre le corps et l’esprit atteint son paroxysme, il existe des formes intermédiaires d’états dissociatifs. Certains sont subis, c’est le cas avec l’état second notamment, alors que d’autres sont provoqués, voire recherchés, puisque induits par l’absorption d’une substance quelconque.

La plus courante réside sans contredit dans la consommation d’alcool. Légal et populaire, l’alcool est non seulement accepté et socialement acceptable, il fait partie intégrante des fêtes et des célébrations, un puissant liant et stimulant social. Agissant directement sur la conscience, l’alcool peut aussi conduire à la perte totale de conscience et de connaissance. L’abus, la consommation chronique ou encore la surconsommation subite et spontanée d’alcool, comme la mode du Binge Drinking par exemple, constituent pour plusieurs un moyen efficace de « s’assommer » et d’oublier ses ennuis.

Il en est de même évidemment pour toute forme d’intoxication du corps. Qu’ils s’agissent de drogues douces ou fortes, de substances stimulantes, de médicaments - sédatifs, analgésiques, stupéfiants opioïdes ou autres -, et même dans certains cas de nourriture (1), toutes ces substances servent principalement à engourdir le corps, à le « geler » temporairement afin d’anéantir ou tout le moins apaiser la souffrance ressentie.

Sans être issu d’un traumatisme grave, ces états dissociatifs intermédiaires servent ultimement le même objectif, celui de distancer l’esprit du corps en altérant la conscience. Momentanément, ils permettent d’oublier les problèmes et les soucis, « d’assommer » l’anxiété ou l’ennui, de déconnecter du stress et des tensions, en somme, de quitter temporairement le corps, les douleurs et le vague à l’âme.

Enfin, dans certains rituels chamaniques, l’état de conscience altéré induit par l’utilisation de psychotropes est recherché afin d’atteindre un état d’extase ou de transe servant à la guérison. En revanche, elle peut également déclencher un état psychotique chez certaines personnes. Distincte de la dissociation, la psychose se caractérise par un déphasage entre la réalité et la perception.


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(1) Certaines personnes souffrant de boulimie témoignent d’une relation à la nourriture similaire à la drogue qu’elles consomment en grande quantité afin d’obtenir cet effet d’endormissement du corps.