lundi 16 mars 2015

L’hypersensibilité


Une intelligence remarquable, ou encore des capacités intellectuelles exceptionnelles, n’ont jamais été considérées une mauvaise disposition. Bien au contraire. On salue et récompense sans cesse les facultés cognitives hautement développées. Les connaissances intellectuelles, le raisonnement logique et mathématique ont toujours remporté la palme. Mais lorsqu’il s’agit du corps et de certaines habiletés surdéveloppées, on entre bien souvent, malencontreusement, dans le monde de la pathologie. C’est le cas, entre autres, de l’hypersensibilité.

Pourtant, tout être vivant est un être sensible (1), la sensibilité étant une propriété que possède un organisme vivant, ou même un organe, à réagir sous l’effet d’une excitation (2). Il s’agit donc d’une aptitude, d’une capacité à détecter une émotion ou de faibles variations ambiantes, par l’usage d’un capteur notamment (2).

Or dans le monde des sensations et des émotions humaines et animales, ce capteur est nul autre que le corps. Semblable au baromètre, le corps est un précieux et sensible instrument vibrant, capable de détecter, de mesurer et d’évaluer les stimuli présents dans l’environnement, ce milieu éthéré dans lequel nous baignons, et leurs subtiles fluctuations.

Doté d’une immense intelligence qui lui est propre, l’intelligence kinesthésique, le corps parvient à sentir, à ressentir, voire pressentir les ambiances, les atmosphères, les messages non-verbaux et les non-dits, sous forme d’impressions ou de fortes sensations viscérales qui tissent cette profonde conviction, cet intime savoir inexplicable que nous appelons intuition.

Autrement dit, le corps et ses habiletés somatiques sont à l’intelligence kinesthésique ce que le cerveau et ses fonctions sont à l’intelligence cognitive, soit un ensemble de tissus nerveux hautement sophistiqué et organisé servant au traitement de l’information des milieux interne et externe de l’organisme.

Alors que les émotions sont des mouvements internes du corps humain, la sensibilité, elle, relève de l’intelligence kinesthésique. C’est grâce au système sensoriel et à une fonction kinesthésique des plus raffinés, le ressenti, permettant à l’instrument corporel de frémir sous l’émergence d’une émotion, que le corps accomplit cette mission.

Dans ce contexte, l’hypersensibilité est donc la manifestation d’une fonction corporelle surdéveloppée, une fonction kinesthésique « haute définition ». Se situant aux antipodes de l’apathie sur l’échelle de la conscience corporelle (voir Apathie et états dissociatifs), l’hypersensibilité démontre une extraordinaire capacité à capter les informations en provenance de l’environnement.

En plus de faire preuve d’une empathie hors du commun, les hypersensibles, ou les hyperémotifs comme on les surnomme généralement, sont facilement émus, touchés ou affectés par ce qui passe autour d’eux, et donc en eux. On les dit à fleur de peau, trop émotifs ou même fragiles, leur hypersensibilité étant perçue, à tort, comme une faiblesse de caractère (3). En réalité, leur instrument est plus sensible que d’autres, mieux « accordé » en quelque sorte, ou tout simplement plus efficace, plus « performant ».

Tout le monde peut jouer du violon. Seulement, certains ont entre les mains un Stradivarius. Ça résonne autrement. 

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(1) Les animaux sont des êtres sensibles - À cet effet, je vous invite à consulter le manifeste sur la reconnaissance des droits des animaux comme être sensible ainsi qu’à signer le Manifeste pour une évolution du statut juridique des animaux dans le Code civil du Québec en consultant le site « Les animaux ne sont pas des choses ».

(2) Définitions du dictionnaire.

(3) Dans certains cas, l’hypersensibilité est à la source d’un trouble de l’humeur.