lundi 12 décembre 2016

Parades nuptiales



On retrouve dans la Nature de nombreux mouvements instinctifs, comme le comportement agressif des mâles durant la période de reproduction chez certaines espèces, ou encore la danse communicatrice des abeilles (voir La danse odorante des abeilles).

Ne nécessitant aucun apprentissage ou coaching d’un congénère (1), ces comportements innés ont été mis en lumière par le biologiste et éthologue autrichien Konrad Lorenz (1903-1989) (2) qui, en étudiant le comportement des animaux sauvages et domestiques, les a nommés action fixe ou schème d’action spécifique, soit une séquence comportementale instinctive indivisible qui se produit jusqu’à son achèvement. Pour ainsi dire « câblés », ces rites surgissent pour la plupart en réponse à une stimulation sensorielle externe.

L’un de ces étonnants mouvements instinctifs est la parade nuptiale, un comportement exhibé par un animal dans le but d’attirer un partenaire sexuel. D’emblée, le paon déployant son éblouissant et captivant plumage nous vient à l’esprit. Or, ils sont nombreux à pratiquer ces danses d’accouplement, plus inusitées les unes que les autres, tant chez les insectes, les oiseaux, les poissons, les mammifères marins que terrestres, étant généralement déclenchées par un stimulus clair, la présence de la femelle (3) (voir aussi Les phéromones ou la chimie des peaux).

Chez l’humain, on retrouverait des comportements semblables dans le jeu de la séduction. Certains chercheurs comparent même la femme jouant avec une mèche de ses cheveux en présence d’un homme à une forme de parade nuptiale (voir aussi Cheveux, poils et pilosité politique). Chez les animaux cependant, ce sont habituellement les mâles qui exécutent mille et une prouesses afin d’impressionner la femelle et obtenir son approbation.

Largement étudié par l’anthropologue américaine Dr. Helen Fisher, les comportements de séduction chez les humains stimulent la sécrétion de dopamine, un neurotransmetteur fondamental aux comportements servant à la survie de l’espèce comme manger et se reproduire par exemples (voir aussi Plaisir et dopamine). 

Au final, danser l’amour permet non seulement à l’espèce de survivre, mais à l’individu de mieux vivre.

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(1) Certains animaux, comme les choucas par exemple, n’ont pas une connaissance innée de leurs prédateurs et doivent apprendre à les reconnaître en observant les individus plus âgés, et donc expérimentés, de leur groupe (Lorenz, 1969).

(2) Prix Nobel de physiologie ou médecine en 1973, partagé avec Karl von Frisch et Nikolaas Tinbergen, Konrad Lorenz s’est entre autres intéressé à l’instinct, à l’empreinte ainsi qu’à l’agressivité, concepts ayant eu une portée significative en psychologie, les études portant sur l’attachement notamment. Il est l’auteur de nombreux ouvrages dont L'Agression, une histoire naturelle du mal (1969, 2010) aux éditions Flammarion. 

(3) On peut observer diverses danses de l’amour dans le coloré documentaire « Les Animaux amoureux » (2007) de Laurent Charbonnier.

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Chronique d'un corps prend définitivement congé. N'hésitez pas à consulter les archives du blogue...

lundi 5 décembre 2016

Let’s get physical, let’s get animal

C’était en 1981, glorieuse époque du disco, des walkmans et des léotards aux couleurs flamboyantes, avec jambières et bandeaux assortis. Oui madame. Dans sa "provocante" vidéo de danse aérobique, entourée de messieurs bedonnants se métamorphosant en hommes musclés grâce à quelques flexions corporelles bien choisies mais peu senties, Olivia Newton-John chantait alors « Physical » : 


Let's get physical, physical
I wanna get physical
Let's get into physical
Let me hear your body talk, your body talk
Let me hear your body talk

Let's get animal, animal
I wanna get animal
Let's get into animal
Let me hear your body talk
Let me hear your body talk 


Depuis belle lurette - bien avant Olivia -, un corps qui s’exprime, ce corps qui « parle », est vu forcément animal, bestial, et donc sexuel. On l’associe d’emblée à la bête dormante en nous, avec ses bas instincts, ses pulsions irrépressibles et ses désirs intarissables (voir aussi Animal social et publicité et Reprendre du poil de la bête). 

De même, un corps à l’entraînement évoque lui aussi un être sexué. Dans son cas, c’est la hausse de la température corporelle qui en est la grande responsable, provoquant un corps incandescent, brûlant de désir, un corps en sueur évoquant un être « en chaleur » (à ce propos, consultez La chaleur corporelle).

Nous sommes des animaux, certes, des primates plus exactement, mais le corps physique, lui, n’est pas plus animal que l’âme ou l’esprit humain. C’est plutôt à l’ombre humaine qu'il faut imputer son empreinte, son influence, projetée par l’inconscient.

Alors que le corps est notre temple, « où que nous soyons, indéniablement, l’ombre qui trotte derrière nous marche à quatre pattes* ».


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*Clarissa Pinkola Estes, dans Femmes qui courent avec les loups (1996).