lundi 15 juin 2015

Farniente


Ne rien faire est un art, une pratique bénéfique pour le corps-esprit. C’est bien souvent durant ces moments dits « morts » que les meilleures idées surgissent, que l’inspiration émerge.

Affranchie de toute pensée envahissante, libre du sentiment de précipitation (voir Accro à l'adrénaline), l’essence de l’être se révèle, se déploie allègrement.


« Rien, quand je n’ai rien cherché j’ai tout trouvé, quand je n’ai rien voulu j’ai tout eu. »
- Jean de la Croix


La chronique fera relâche durant la saison estivale.

lundi 8 juin 2015

La chaleur corporelle


Dans une perspective dualiste, où le corps s’oppose à l’esprit, la chaleur corporelle symbolise une victoire du corps sur l’esprit, et donc contraire à la raison. Conséquemment, elle est associée aux forces du Mal, à l’emportement et à la folie.

À l’origine, on utilisait l’expression « passions du corps » pour désigner les émotions humaines qu’il fallait dominer grâce aux vertus de la pensée logique et rationnelle. « La colère, comme toutes les passions, est d’abord un état du corps », écrivait le philosophe Friedrich Nietzsche (1844-1900).

Par leur pouvoir « sur le corps », toute « passion du corps » représente une menace certaine pour l’être humain, celle de lever le voile de la raison. Entrant ainsi dans le monde de « l’irrationnel », les émotions - en particulier la colère - symbolisent la perte de contrôle de soi et de l’esprit.

Il en est de même avec la chaleur corporelle qui laisse présumer un « corps en chaleur », et donc un être sexué et sexuel. Dans un discours judéo-chrétien, fondamentalement dualiste, c’est par le corps que l’être humain pèche contre l’esprit (ou Esprit*), enfreignant ainsi la loi divine.

Siège des pulsions primitives et des « bas instincts », le corps est considéré le véhicule des forces du Mal. Il incarne non seulement la finitude de l’être - « Tu es poussière et tu retourneras poussière », alors que l’âme, elle, immortelle, s’élève au Ciel -, mais il est aussi porteur du désir charnel. Dans ce contexte, toute forme de chaleur montante et d’échauffement des sangs est une « allumeuse » du brasier des désirs ou de pulsions irrépressibles incontrôlables, susceptibles de faire basculer l’être humain dans le péché.

La chaleur corporelle suggère par ailleurs un corps « possédé », un être « habité », soit par la maladie (la fièvre par exemple), soit par des forces extérieures surhumaines, voire diaboliques. Nous renvoyant ainsi au « Feu du Mal », une hausse de la température corporelle signale une présence maléfique comme dans l’expression « avoir le diable au corps ».

C’est ce corps torride et « indomptable » qu’il faut soumettre à la douche froide, au bain glacial, afin de tempérer les ardeurs, garder son sang-froid, et surtout, retrouver le contrôle de soi et sur soi.

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*Notons que « Saint-Esprit » nous renvoie également à la notion d’un esprit sain, s’opposant au corps « malsain ».

lundi 1 juin 2015

Momentum et inertie


En physique, le momentum est une quantité de mouvement. Il fait référence à l’impulsion reçue d’un objet ou d'une masse.

Dans la vie de tous les jours, le momentum se manifeste par une opportunité, un événement extérieur à soi. Que se soit par chance ou par providence, on reçoit alors un élan, une force externe qui n’a rien à voir avec la volonté. Comme si la Vie nous envoyait un coup de pouce, un coup de main, ou encore une petite poussée pour démarrer, on avance fièrement avec le sentiment d’avoir le vent dans les voiles.

Divers éléments peuvent toutefois nous faire perdre le momentum et ainsi freiner notre avancée. La peur, le doute ou la rumination peuvent ralentir un mouvement, voire l’avorter, et paralyser.

Puissante émotion primaire, la peur est capable à elle seule de figer tout mouvement (voir « La peur au ventre »). Les pensées excessives et des états émotionnels passagers comme l’angoisse, l’anxiété ou la dépression, par exemples, créent pour leur part de la turbulence dans les mouvements, perturbant alors le flux naturel du courant vital.

Aux antipodes du momentum se trouve un autre phénomène de la mécanique classique, l’inertie. Celle-ci évoque la résistance d’un corps ou d’une masse aux variations de vitesse. Au quotidien, l’inertie prend la forme d’un corps sans énergie, incapable de mouvement ou résistant à tout changement de vitesse ou de direction.

En psychologie, on parle alors de résistance au changement, une notion freudienne qui fait référence à cette profonde difficulté qu’a l’être humain à changer ses habitudes et comportements. Outre l’énergie qu’elle exige, l’effort énorme qui doit y être investi, la résistance peut également engendrer de la souffrance, de la douleur, un sentiment d’échec ou bien un état de torpeur (1).

Car la Vie elle-même est en mouvement, un courant énergétique en déplacement continu. Vouloir contrôler ou diriger ce flux vital, tout comme le passage du temps, est non seulement impossible, mais source potentielle de tension et de déséquilibre.

Il est donc préférable, et même bénéfique, de suivre ce courant vital, d’aller avec lui, de se laisser porter par lui et, comme on dit en anglais, « Go with the flow ».


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(1) La dépression peut aussi être la cause d’une immobilisation de l’organisme humain. Il ne s’agit donc pas, dans ce cas, de résistance aux changements, mais bien d’une maladie altérant la biochimie du cerveau.