lundi 27 octobre 2014

Les rythmes du corps


Tout est mouvement. De l’atome vibrant jusqu’au cosmos en perpétuelle expansion, en passant par toutes les cellules qui composent notre corps, tout est en mouvement constant. Ce mouvement est celui de la vie.

Animant tout organisme animal et végétal, ce flux vital est par ailleurs rythmé. Prenant la forme de pulsations, de battements, de fréquences, de cycles ou de cadrans biologiques, les rythmes du corps ponctuent notre vie. Telle une symphonie organique, le corps orchestre majestueusement d’innombrables mouvements internes et leurs variations.

Battant la mesure, le cœur donne la cadence. Ses pulsations continues propulsent le sang vers l’avant, assurant ainsi sa circulation. Le flot sanguin possède lui aussi une fière allure et c’est sous forme de pression artérielle qu’on la mesure. En retournant vers le cœur, son affluence donne le pouls de la situation. Signes vitaux clairs et accessibles, les fréquences cardiaque et artérielle sont les principaux rythmes du corps confirmant la présence du courant vital.

Le va-et-vient des poumons, ce mouvement incessant de contraction et d’expansion, assure quant à lui le passage de l’air et son expulsion. Gaz précieux pour toutes les cellules du corps, l’oxygène alimente la combustion énergétique nécessaire à l’absorption des nutriments.

En plus de ces rythmes fondamentaux et des mouvements apparents du corps, on retrouve évidemment d’innombrables mouvements internes comme ceux des organes (les intestins, par exemple, possèdent leurs propres mouvements de contraction appelés péristaltismes), des cellules en déplacement, des cycles du corps (menstruel ou du sommeil par exemples) ainsi que les rythmes circadiens. Influencées par les variations de lumière et les saisons, ces horloges biologiques assurent la libération régulière des hormones qui participent activement au métabolisme de l’organisme.

D’autres fluides et substances du corps comme la lymphe, les neurotransmetteurs, les peptides et autres ligands, sont eux aussi en mouvement constant dans le corps. En plus d’influencer le filtre perceptuel et l’humeur, ces chaînes de molécules jouent un rôle déterminant au maintien de l’équilibre interne et de la santé (voir aussi Émotion, mouvement interne du corps).

Enfin, même la croissance capillaire suit un rythme périodique et notre ADN est par ailleurs muni d’une horloge moléculaire qui révise son bagage génétique et en modifie le contenu à un rythme régulier. C’est dire à quel point le rythme est inscrit en nous, intrinsèque à la Nature, au mouvement de la vie.


lundi 20 octobre 2014

Reprendre du poil de la bête


La découverte de Darwin sur les origines primitives de l’être humain avait complètement secoué le monde au 19ième siècle. Aujourd’hui toutefois, on entend couramment parler du « côté animal » de l’être humain, comme si, à l’instar de Spock (1), cohabitaient en nous deux moitiés, l’une humaine, l’autre animale, et donc forcément une « bonne » et une « mauvaise » (2).

En opposant inlassablement la raison à l’instinct, la pensée aux émotions, la tête au « reste du corps », les « hautes » fonctions cognitives aux « bas » instincts corporels, et donc inévitablement, le néocortex aux soubassements cérébraux, un discours dualiste suggère un duel intérieur. Il nous renvoie l’image d’un affrontement constant entre des forces intérieures opposées, un combat perpétuel entre un être rationnel et civilisé versus une bête sauvage et féroce.

Or, puisqu’il s’agit d’une évolution – et nous reviendrons sur le point de vue neurologique à cet égard ultérieurement –, il n’existe pas de dualité comme telle, de côtés « humain » et « animal » à proprement parler. Il faut plutôt parler d’influences.

Similairement à la plante dont les racines sont essentielles à son développement et à sa floraison, les facultés cognitives et hautement développées de l’organisme humain trouvent leurs assises dans une solide fondation où s’imbriquent les instincts, les pulsions basiques et les émotions. La raison repose ainsi sur des forces primitives, et les comportements civilisés qui en découlent prennent eux aussi racine dans ces puissants élans pulsionnels et autres mouvements internes du corps.

Ce sont ces mêmes forces originelles qui ont conduit nos ancêtres à modifier leur posture et qui nous ont guidés jusqu’ici. Ensemble, ou mieux encore à l’unisson, la raison et l’instinct prennent toujours les meilleures décisions.

Par ailleurs, marcher la tête haute donne du chien. L’un n’empêche pas l’autre.

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(1) Personnage culte de la série américaine et films « Star Trek », Spock ou Monsieur Spock est mi-humain (côté maternel) et mi-Vulcain (côté paternel). Se réfugiant dans le caractère rationnel des Vulcains, il domine les émotions humaines par le refoulement, la pensée logique et rationnelle, un processus cognitif appelé kolinahr. Incarnant le contrôle et la maîtrise de soi, le célèbre personnage apparaît habituellement vêtu d’un chandail bleu clair suggérant un tempérament froid, un être contenu, indifférent, voire insensible, comme dans les expressions « rester de glace », « garder son sang-froid » ou la « tête froide ».

(2) Étant ce qu’ils sont, les systèmes binaires (bon-mauvais, féminin-masculin, gauche-droite, etc.) obligent à faire un choix, voire à camper une position, alors qu’il existe bien souvent un continuum de zones grises entre deux extrêmes, des états intermédiaires entre deux positions, comme on le constate avec l’identité sexuelle par exemple.

lundi 13 octobre 2014

Le 6ième sens, une question de perception


Les cinq sens tels qu’on les connaît - la vision, l’ouïe, le goût, l’odorat et le toucher - servent à percevoir de l’information en provenance de notre environnement. Grâce à leurs organes respectifs, ils captent des signaux, ou stimuli, qui sont ensuite conduits sous forme d’influx nerveux via un nerf jusqu’au cortex ou une région bien spécifique du cerveau.

Dans ce contexte alors, qu’est-ce que le 6ième sens? Pour les uns, il s’agit d’un don, pour les autres, c’est le mouvement.

Comme son nom l’indique, la perception extra-sensorielle implique une captation d’information qui dépasse les cinq sens habituels. Elle fait référence à une habileté ou faculté à saisir un stimulus provenant de l’extérieur sans faire appel au traitement sensoriel conventionnel. Qu’on l’appelle clairvoyance, prémonition, précognition, pressentiment ou intuition, il s’agirait d’une aptitude innée qui sommeille en nous tous qui croît avec l’usage.

Pour d’autres toutefois, le mouvement et la proprioception constituent le 6ième sens. Du latin proprius signifiant « personnel », la proprioception désigne cette profonde sensibilité que nous avons de nous-mêmes par la conscience du corps et sa relation dans l’espace.

Par sa capacité à se tenir en équilibre, à se mouvoir et à se déplacer, le corps véhicule sans cesse des informations en lien avec l’environnement et l’espace-temps. C’est grâce aux muscles, aux os et aux articulations notamment que ces données parviennent jusqu’au système nerveux central.

Le simple fait de porter une tasse de thé à sa bouche, par exemple, comporte une myriade d’informations concernant le poids de la tasse, sa température, son orientation, son déplacement dans l’espace, l’emplacement de la bouche en relation avec le bras en mouvement, etc. Comme c’est le cas avec les autres sens, plusieurs de ces informations sont traitées sans aucun effort conscient de notre part.

Qu’ils s’agissent d’intuition ou de proprioception, dans les deux cas, le 6ième sens implique une perception par le ressenti. Étant un précieux et sensible instrument nous aidant à faire sens de notre environnement, notre corps est le porteur du 6ième sens.


lundi 6 octobre 2014

Effort et habitude


Tout début est exigeant. Commencer un nouvel emploi, un nouvel entraînement, apprendre une langue ou une nouvelle danse, s’initier au piano, au tennis ou au taekwondo, bref, acquérir une nouvelle habitude demande du temps et de l’énergie. Elle requiert un effort supplémentaire de notre part, car tout nouveau départ soulève un mouvement d’opposition.

L’effort se définit par le « fait de mobiliser et de mettre en œuvre toutes ses forces et ressources en vue de vaincre une résistance, d’atteindre un objectif » (1). Intrinsèque à l’adoption ou à la modification d’un comportement surgit inévitablement une résistance. C’est ce qu’on appelle la résistance au changement.

C’est là non seulement une notion freudienne, mais une loi fondamentale de la physique. La troisième loi de Newton en Mécanique classique portant sur le mouvement des corps, le principe des actions réciproques, stipule en effet que « tout corps A exerçant une force sur un corps B subit une force d'intensité égale, de même direction mais de sens opposé, exercée par le corps B » (2). En d’autres termes, pour toute action existe une réaction égale et opposée.

Créer une nouvelle habitude exige donc un effort physique et mental, requiert une discipline du corps et de l’esprit. Avant de passer à l’action, il faut d’abord faire des choix. C’est l’esprit, ou le mental, qui s’affaire à prendre les décisions quant à la nouvelle activité ou la modification d’un comportement en plus d’élaborer des stratégies d’exécution. Une fois établies, c’est le corps qui les met en œuvre et en pratique, concrétisant le plan d’action.

Comme « une fois n’est pas coutume », forger une habitude demande nécessairement plusieurs applications. Maîtriser un art ou une langue, entre autres, exige des heures de répétition. 

Or, initialement, reproduire le même comportement sans succès apparent soulève généralement de la frustration et du découragement. Cela peut éveiller un sentiment d’échec ou d’incapacité, faire ressurgir les insécurités les plus profondes. C’est habituellement durant cette période d’apprentissage et d’adaptation que les abandons ont lieu.

Toutefois, avec une bonne dose de motivation, à force de volonté, de détermination et surtout de répétition - « c'est en forgeant qu'on devient forgeron » -, on développe une accoutumance. Ancrée dans le corps et dans l’esprit, l’habitude s’installe dans la routine. Automatique et familière par définition, elle fait partie du train-train quotidien, ne requiert pratiquement plus aucun effort de notre part.

La perdre maintenant en exige tout autant. 

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(1) définition du dictionnaire
(2) Newton, I. (1995). De la gravitation; suivi de Du mouvement des corps. Paris: Gallimard.