lundi 28 juillet 2014

Les maux du corps


Bien souvent, sans même s’en rendre compte, nous parlons à tort et à travers de notre corps. Des expressions s’immiscent dans notre langage, lesquelles, à la longue, peuvent nuire à notre santé. Les mots peuvent générer des maux.

En apparence innocentes, les expressions verbales impliquant le corps sont nombreuses. On « pogne les nerfs » après quelqu’un, on « s’étourdie » pour passer le temps, on « se fend en quatre » pour une cause, on « se tue » à la tâche. Une situation « donne à vomir », l’autre exige « d’avoir les reins solides » ou bien de « prendre son mal en patience ». Ceci nous « brise le cœur », ou pire encore, nous « scie les jambes ». Bref, en s’exprimant de la sorte, sans même le vouloir, on se fait violence.

Lorsqu’une personne nous « énerve » ou nous « fait suer », ce ne sont pas seulement nos nerfs et notre sueur qui sont ainsi sollicités, c’est tout le corps qui est appelé à réagir. Nous le savons tous, les mots sont puissants. Qu’ils soient prononcés tout haut dans une conversation, ou murmurés doucement en son for intérieur, les mots ont une portée. Ils se projettent dans le monde via notre corps.

Les paroles ne s’envolent pas toujours. Bien au contraire. Ce sont des affirmations claires à notre sujet, des déclarations sur notre état de corps. Tout aussi puissantes, les pensées, elles, sont encore plus pernicieuses car omniprésentes. Elles trottent dans notre tête inlassablement, traversent notre esprit sans répit.

À force de répétition, certains mots deviennent familiers, voire rassurants. On les utilise sans même porter attention à leur sens réel, leur contenu, leur charge. Involontairement ou inconsciemment, ils finissent par s’ancrer confortablement dans notre discours personnel. De là surgissent les tensions, les douleurs et les symptômes physiques inexpliqués.

En paroles ou en pensées, ces mots en lien avec le corps sont absorbés par le subconscient pour être exécutés comme des ordres. Les pensées sont de l’énergie, la matière aussi. Et plus souvent qu’autrement, corps et esprit étant unis, ces deux sources énergétiques cherchent à résonner ensemble, à vibrer à la même fréquence. Ces mots prennent alors forme, se manifestent dans la réalité. Car ce qui est psychologique est aussi biologique.

D’où l’importance de non seulement déclarer haut et fort sa santé, sa force et sa vigueur, mais de porter attention au flot incessant de nos pensées, à ces paroles qui parfois restent, à ces mots qui prennent corps.


lundi 21 juillet 2014

La tête vs le « reste du corps »


La psychologie porte sur l’étude de l’être humain et ses comportements. Comme son nom l’indique - le terme provient du grec psyche désignant âme ou esprit, et logos signifiant étude -, on s’intéresse principalement à l’esprit humain. Associé d’emblée à la tête, c’est donc cette partie du corps qui est privilégiée pour fins d’étude.

Évidemment lorsqu’on parle de la « tête », on fait habituellement référence à l’organe qu’il abrite, le cerveau. Nombreuses recherches en psychologie portent en effet sur les processus cérébraux et les fonctions cognitives comme le langage, la mémoire ou l’attention, par exemples. Grâce aux techniques d’imagerie cérébrale, le domaine des neurosciences a connu un véritable essor au cours des dernières décennies, dévoilant les structures et les réseaux neuronaux activés dans divers processus cognitifs.

Or, la division qui existe entre la tête, et ce que les neuroscientifiques appellent le « reste du corps », remonte à Descartes qui, au 17ième siècle, désireux d’étudier le corps, se voit interdit toute question relative à l’esprit (ou « Esprit ») réservée à l’Église. Depuis le célèbre « Je pense, donc je suis », persiste une vision dualiste du corps humain, séparant l’esprit du corps, et en l’occurrence, la tête du « reste du corps ».

« Extrémité supérieure du corps* », la tête est vue « dominante » sur l’ensemble, d’une part, par son emplacement - comme on dit en anglais « Location, location, location » -, et d’autre part, en raison de ses fonctions hautement importantes, dites supérieures. Il est vrai que ces fonctions exécutives sont primordiales pour tout le fonctionnement de l’organisme humain. Cela ne fait aucun doute. Mais qu’est-ce qu’une tête sans corps sinon un organe isolé, un amas de tissus sans connexions?

On semble trop souvent l’oublier, la tête fait partie intégrante du corps humain, le cerveau étant un organe de celui-ci. Non seulement tête et corps sont inséparables, mais comme tout bon danseur vous le dira, là où va la tête va le corps. Seulement, c’est l’esprit qui est parfois ailleurs.

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* définition du dictionnaire

lundi 14 juillet 2014

La peur au ventre


On dit que « la peur donne des ailes ». En réalité, c’est plutôt la perception d’une menace, réelle ou présumée, qui fait prendre ses jambes à son cou et fuir à toute vitesse. Plus souvent qu’autrement, la peur, elle, paralyse.

De toutes les émotions humaines, la peur, d’un point de vue biologique, est sans aucun doute la plus puissante. Capable de monopoliser le corps en un seul instant, la peur fige l’organisme en entier, supprimant momentanément toute possibilité de mouvement.

Émotion fondamentale, la peur est régie par une structure limbique du cerveau, l’amygdale, responsable notamment des réactions automatiques de combat et de fuite. Jouant un rôle de protection, cette émotion primaire est essentielle à la survie des espèces, le figement prévenant la détection par un prédateur.

Ce n’est toutefois pas par hasard que l’on dit « avoir la peur au ventre », car du coup, son émergence perturbe de nombreuses fonctions vitales de l’organisme humain incluant la digestion. C’est via le système nerveux entérique que la peur et ses consoeurs (angoisse, anxiété, phobie, etc.) atteint les intestins et interrompt les mouvements internes du corps. Nouant l'estomac, la peur occupe le centre du corps, « déchire » l’intérieur. « La peur m’a tordu les entrailles* », écrivait l’auteur Steve Watson.

L’immobilisation infligée par la peur restreint les mouvements externes et internes du corps, comme celui du diaphragme par exemple, provoquant par le fait même une respiration superficielle et inconfortable. Coupant ainsi le souffle, la peur avorte tout élan vers l’avant et fige même le sang. Ne dit-on pas « être glacé de peur »?

Cette paralysie subite et momentanée permet cependant à l'organisme de recevoir un message clair et sans équivoque. Telle une alarme interne, la peur lance un cri d’alerte, son émergence ne pouvant être ignoré.

En perturbant directement les fonctions vitales, l’émotion de la peur démontre non seulement son pouvoir sur le corps, voire sa toute-puissance, mais aussi, et surtout, son importance biologique, son rôle capital à la survie de l'espèce. Une fois le danger passé évidemment, ses effets physiologiques s’estompent et le corps retrouve son état habituel.

Notons finalement que la peur est à l’origine d’états de corps comme l’anxiété, le trac ou la nervosité (voir La nervosité). De manière beaucoup plus subtile ou complexe, on la retrouve également à la source de nombreux mécanismes de défense et de sentiments haineux, l’amour et la peur étant les deux sources fondamentales des émotions humaines.

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* dans Avant d’aller dormir, Sonatine, 2011.



lundi 7 juillet 2014

Les deux cerveaux du corps humain

Nous ne possédons pas un seul, mais bien deux cerveaux. Le premier, que nous connaissons tous, couramment appelé tête ou cervelle, est le cerveau cognitif. Protégé par la boîte crânienne, le cerveau cognitif, ou encéphale, est l’ultime centre de contrôle et de traitement de l’information de l’organisme humain. Il abrite les pensées, l’attention, les centres du langage, la mémoire, ainsi que de nombreuses facultés dites « supérieures ». C’est le siège de la conscience et de la raison.

Notre deuxième cerveau, lui, - qui est en réalité le premier car plus ancien - se situe dans le ventre. C’est le cerveau instinctif. Tout comme l'intestin où il règne, le cerveau instinctif est hautement autonome, opérant sans l’intervention de la pensée consciente. C’est lui qui nous permet de « sentir avec ses tripes », d’avoir une forte intuition, ou ce que l’on appelle en anglais un « gut feeling ». Bref, il s’agit d’instinct et de pressentiment.

Ensemble, ces deux cerveaux nous offrent une gestion complète de notre environnement, et à l’instar des deux hémisphères qui composent la cervelle, chacun possède son champ d’activité et de spécialisation.


Le cerveau cognitif

En psychologie, le terme cognition désigne les facultés mentales comme la perception, l’intelligence, le langage ou la mémoire notamment, apparues grâce à la longue et lente évolution de tout le système nerveux humain et au développement du néocortex.

Siège de la pensée rationnelle, de la logique et du raisonnement, le cerveau cognitif a pour fonction de gérer les informations « entrantes » et « sortantes » de l’organisme humain. Pour ce faire, des signaux électro-chimiques, les influx nerveux, empruntent les embranchements du système nerveux rejoignant ainsi les organes et leurs fonctions.

C’est grâce au cerveau cognitif que nous sommes capables d'accomplir des tâches complexes et hautement développées comme réfléchir, planifier et créer. Mais comme nous le verrons ultérieurement, le « mental » peut également jouer des tours, voire miner l'existence.


Le cerveau instinctif

Situé dans les tripes, le cerveau instinctif porte également le nom de cerveau entérique, étant régi par le système nerveux entérique. Notons que ce dernier a connu un véritable engouement au cours des dernières décennies, notamment dans le domaine de la gastro-entéro-immunologie, les recherches révélant une organisation autonome fort complexe, riche en neurones et neurotransmetteurs.

Comme son nom l’indique, ce "deuxième cerveau" du corps humain, et pourtant plus ancien, nous sert principalement d’instinct. Opérant sans l’intervention de la pensée consciente, ces signaux procurent plutôt une forte sensation viscérale, parfois inexplicable, ou même étrange, donnant lieu à une connaissance ressentie dans son for intérieur, dans les entrailles. 

Loin d’être irrationnel, ce savoir, couramment appelé « Gut Feeling » ou « Gut Instinct » en anglais, ainsi que les mécanismes qui le sous-tendent, remontent à notre passé primitif, à notre instinct animal. On parle alors de précognition, c'est-à-dire précédant l'entendement et la compréhension.

Notons finalement que l'intestin est le seul organe du corps à posséder son propre cerveau. Fascinant, non?